Plus le temps passe, plus s’éloigne cette œuvre qui, ayant suscité le commentaire à l’égale des plus grandes du XXe siècle, a par rapport à elles le désavantage mais aussi la force singulière d’avoir été incarnée par son auteur. « Œuvre-vie », dans les termes de Borer, œuvre faite chair, en actions et en discours, forcément inachevée, interrompue par la mort et appelant par conséquent le thrène, l’hommage, la commémoration, de même qu’elle suscita du vivant de l’artiste la fascination, voire l’idolâtrie.
Dans cette introduction érudite à une œuvre qui « présentant tous les signes d’une complexité dérangeante, est de celles qui ne peuvent faire l’économie d’une large réflexion théorique », Alain Borer ne ménage pas inutilement le mythe. Relevant chez Beuys des traits sciemment christiques et, dans son parcours, une touche voulue de légende dorée, sa Déploration ne donne pas dans l’hagiographie ; elle nomme sans ergoter l’apparence de « rabâchage », voire de « flou artistique », et l’esprit de sérieux de cette « conférence permanente », contrepied total de l’art pour l’art. Mais l’examen attentif des problèmes soulevés par cet homme-œuvre permet au tact et au talent de Borer de les surmonter en nommant l’ambition, inclassable à force d’être totalisante, qui lui confère ce qu’il faut bien appeler à plus d’un titre sa grandeur.
Analysant les travaux et les performances dans l’ensemble et dans le détail, explorant la figure de Beuys en cercles concentriques constituant autant d’avatars d’un artiste « pédagogue-berger-thérapeute-évolutionnaire-révolutionnaire », l’hommage d’Alain Borer rend justice à celui qui fut l’auteur d’un concept d’art infatigablement élargi à toute la société ; qui vit en chaque homme un artiste attendant pour s’éveiller d’être reconduit aux principes manifestés par la vie et les matériaux naturels ; qui professa très tôt la nécessité de l’assainissement du rapport de l’humanité à son environnement ; et qui, armé d’une inlassable volonté de guérir son pays natal, ouvrit la voie à toute la génération d’artistes allemands de l’après-guerre.
Les auteurs
Le poète, auteur, essayiste et romancier Alain Borer est né en 1949 à Luxeuil-les-Bains. Sa renommée dépend avant tout de ses qualités de spécialiste mondial d’Arthur Rimbaud. Pendant trente années, il se consacre à la poésie et à l’étude du poète. Il publie plusieurs articles, rédige des livres et des essais le concernant et part sur ses traces à travers le monde, notamment au cours d’un voyage en Éthiopie, parcourant ainsi tous les lieux de la Rimbaldie et conservant ses trouvailles dans sa rimbaldothèque.
Après le centenaire de la mort de Rimbaud, Alain Borer, également professeur d’enseignement artistique à l’école des Beaux-arts de Tours, entame une deuxième phase dans son œuvre. Il publie un roman, Koba, où le lecteur assiste à une véritable chasse aux dieux dans un univers à mi-chemin entre les mythes et l’Histoire, puis une pièce de théâtre et, toujours, des poèmes en allées cosmiques lyriques, livres pataphysiques, et ce qu’il appelle « noèmes ». Puis, dans son récit Le Ciel & la carte, cet écrivain-voyageur invite à la découverte des « peuples de l’eau » à bord d’un bateau à travers les mers du Sud, entre enfer et paradis.
Il est également Président du Printemps des Poètes et officier des Arts et des Lettres.
Depuis 2014, il a entrepris de défendre la langue française d’abord avec son essai De quel amour blessée, réflexions sur la langue française, puis par des articles et des conférences.
Presse
Brigitte Ferrand (Europe) [cf. PDF]
Sylvie Coëllier (Critique d’art) [cf. PDF]
Cécile Dutheil de la Rochère, En attendant Nadeau
Gérard-Georges Lemaire (Visuelimage)
Pascale Martello (Inactualités et acribies)
Christian Ruby (nonfiction.fr)
Patrick Scemama (La République de l’art)
[sans nom d’auteur] (Librairie Attitude)