Erdgeist

« Le silence nous porte à la contemplation, à l’écoute de l’inouï. S’il me fascine, c’est que je sais qu’il m’attend quelque part. S’il fait mine d’être muet, peut-être nous écoute-t-il ? Il n’est pas le vide, il est plein de lui-même. Il s’écrit par la ponctuation, il bat entre les mots. Constitutif de la musique, il est audible. Il se donne à voir par le dépouillement en peinture ou par les arrêts entre nos gestes. Il doit être photographiable ; certains y sont déjà parvenus. Oui, photographier le silence qui ne réclamerait plus les mots qui m’envahissent et me débordent si souvent. »
Les images rapportées par Patrick Bogner de ses incursions aux abords du cercle arctique, dans les Orcades, les Féroé, à Saint-Kilda, en Islande ou en Norvège, mettent en scène le sublime écrasant de paysages déserts et déchaînés, inhabitables, où l’homme, fatalement de passage, vient rechercher un face-à-face avec des forces qui l’excèdent.
Inspiré par le romantisme primitif du Sturm und Drang, le photographe reprend ainsi l’ambition de Caspar David Friedrich : celle d’une peinture de paysage capable – si tempétueuse, heurtée et accablante qu’elle soit – de susciter la même contemplation que les images sacrées.

Date de publication : 3 juillet 2020
Format : 22,5 x 30 cm
Poids : 1100 gr.
Nombre de pages : 144
ISBN : 978-2-85035-006-1
Prix : 35 €

PRÉSENTATION :
Saillies rocheuses à l’aplomb du vide. Mers de rocaille noire, montagnes aux crêtes déchirées, falaises brisant la battue grise des flots. Heurts de vagues, chutes d’eaux, jaillissement de geysers où planent en silence des oiseaux impavides. Coulées de glaces, éboulis, moraines, routes fourvoyées, silhouettes énormes de plateformes pétrolières à l’abandon, jetées barrant vainement la mer, masures ruinées, carcasses d’avions. Figures emmitouflées et anonymes, de dos ou en profil perdu, s’éloignant, périssables, dans un désert de neige...
Les images rapportées par le photographe Patrick Bogner de ses incursions aux abords du cercle arctique, dans les Orcades, les Féroé, à Saint-Kilda, en Islande, en Écosse, aux Hébrides ou en Norvège, mettent en scène le sublime écrasant de paysages déserts et déchaînés, inhabitables, où l’homme, fatalement de passage, vient rechercher un face-à-face avec des forces qui l’excèdent.
Les sources de son inspiration sont à chercher au-delà du regain d’intérêt récent pour cette nature nordique, ou peut-être en-deçà, dans un sous-bassement culturel dont toutes les manifestations sont loin d’être taries : ce romantisme primitif dont accouche le Sturm und Drang. Dans son avant-propos, Patrick Bogner s’inscrit résolument dans la lignée de ces écrivains allemands, anglais et français – Goethe, Lenz, Tieck, Büchner, Blake, Chateaubriand, Hugo, Nerval… – dont les citations scandent l’ouvrage et pour qui le spectacle de la nature offre le répondant d’un état intérieur. Il se déclare, surtout, héritier de Caspar David Friedrich, plaçant ainsi son travail sous l’autorité d’une peinture de paysage dont l’ambition est de susciter une contemplation égale à celle des images sacrées.
Et de fait, pour tempétueuses, heurtées et accablantes qu’elles soient, les photographies de ce recueil, Erdgeist – « esprit de la terre », titre aux accents panthéistes – sont prises dans un silence assourdissant qui est en premier lieu celui de l’hiver. Le choix du noir et blanc, portant au paroxysme le contraste entre la terre et le ciel, le roc et la neige, le solide et le liquide, l’inerte et le mouvant, leur confère une dignité hiératique et les conduit à la frontière de l’abstraction, dans cette apparence de dépouillement et simplicité qui est, des mots de l’artiste, « ce qui requiert le plus d’effort ».

« Images expédiées du bout du monde, de cet au-delà où aucun navire, aucun avion ne vous mènera jamais. Le vrai, l’authentique no man’s land glacé, tempétueux, austère des Romantiques tel qu’il l’ont rêvé, décrit ou peint - mais ici transfiguré par la magie d’un œil (et d’une technique) digne des plus grands - Stieglitz, Weston ou Adams. Les visions de Caspar David Friedrich, de Fuesli ou de Nolde transcrites au nitrate d’argent, les cauchemars de Poe ou de Jules Verne, réincarnés en mirages de pierre, de neige et de tempêtes : une “descente dans le maelstrom”, aux franges écumeuses de l’inconnu – dans le domaine inviolé des Vikings et du Kraken. Un choix érudit et lumineux de citations illustre cet opus hors normes, servi par une impression et une mise en page de toute beauté. » (Bruno Krebs)

Les auteurs

Photographe indépendant depuis 1982, Patrick Bogner vit et travaille à Strasbourg. Ses thèmes de prédilection s’articulent autour de l’Ailleurs, cet autre lieu qui ne serait pas un lointain, mais l’envers d’un lieu, un ailleurs qui aurait besoin de la photographie pour s’incarner. Il arpente les terres nordiques après avoir, vingt années durant, foulé les terres reculées d’Amérique latine. Il explore, dès 2015 la thématique du Sublime, du silence et de la « tragédie du paysage » chère aux premiers romantiques allemands, ceux du cercle d’Iéna.
Son site Internet.

Presse

Charles Duttine, La cause littéraire
Fabien Ribery, L’Intervalle
François Xavier, Le salon littéraire
Portfolio, En attendant Nadeau

Serge Hartmann, DNA
Portfolio de présentation du livre dans Or Norme

Hartmann sur Bogner / DNA
Portfolio Bogner Or Norme

Extraits

Photographie

Cette collection rassemble des livres de photographie ainsi que diverses collaborations entre photographes et écrivains. Chaque volume se définit par sa volonté d’expérimenter des rapports, chaque fois singuliers, entre dimension visuelle et dimension textuelle. Photographies et récits travaillent ensemble pour affiner notre regard sur le monde, ses populations de toutes sortes, ses étranges rebuts, ses grands espaces.