Cet ouvrage constitue le catalogue de l’exposition « Palimpseste » de Farhad Ostovani au musée d’Art et d’Archéologie du Périgord et à la médiathèque Pierre Fanlac de Périgueux, du 15 octobre 2020 au 4 janvier 2021.
Le titre que Farhad Ostovani a conçu pour ses expositions de Périgueux est on ne peut plus adéquat à l’ensemble de son œuvre. On gagnera à pénétrer dans les voies diverses et les multiples réalisations de son œuvre avec pour clef ce nom de « palimpseste » par lequel il détermine une image accomplie, conquise par le travail et sa maturation, et stabilisée dans le sentiment de satisfaction qu’elle donne à son auteur. Car cet examen de soi nous apprend une chose tout à fait fondamentale : l’œuvre qui se fait, qui va selon ses rythmes, qui se diversifie par de multiples motifs peints ou dessinés, et par des techniques et des formats non moins divers, est coextensive à la temporalité de l’existence comme telle, qui n’est pas moins variée ni moins différenciée. De telle sorte que l’activité créatrice et l’existence personnelle de cet artiste ne sont en rien distinguables, en rien hétérogènes l’une à l’autre. De Farhad Ostovani la vie et l’œuvre sont, foncièrement, le même : une œuvre-vie.
Farhad Ostovani :
On me demande souvent, combien de temps as-tu mis pour peindre ou dessiner ceci ou cela ?
Ma réponse est toujours : ça dépend. Et de quoi cela dépend-t-il ?
Parfois, tu peux finir un travail en une demi-heure. Ou en une heure. Ou en une journée. Et parfois, cela prend des années.
Quand arrive-t-il, le moment où tu te dis, OK, c’est fini ? Ce moment qui n’existe qu’entre toi et ton œuvre. Le moment de satisfaction.
Cette satisfaction peut arriver assez vite, en quelques heures, ou en quelques jours ou semaines. Mais elle peut aussi arriver au bout de plusieurs années.
(…)
Quand tu parviens au moment de satisfaction – peut-être pas tant au sens où rien ne peut être ajouté, que lorsque tu vois que rien ne peut être retiré – tu dis, ça y est, c’est fini. Parfois, tu ne parviens jamais jusque-là. Parfois, cela prend des années. Parfois, un jour ou une heure.
Quand tu recommences à travailler sur une pièce que tu avais commencée longtemps auparavant, parfois tu lui ajoutes, parfois tu lui enlèves des éléments. Mais le travail le plus ancien n’est jamais complètement effacé. Il laisse une trace, un effet, une mémoire de lui-même, qui change et enrichit le travail en cours. Le résultat peut être quelque chose de différent par rapport à l’œuvre initiale. Mais il est certainement plus riche avec son histoire, avec les épreuves des années.
Ce sont toutes les voies inévitables, par lesquelles on arrive à l’état d’être satisfait avec une œuvre, que j’appelle palimpseste.
Ouvrage publié en coédition avec la Ville de Périgueux.
Les auteurs
Farhad Ostovani est né dans le nord de l’Iran, à Lahijan, en 1950. Il commence à peindre à l’âge de douze ans. Il entre en 1970 au département des Beaux-Arts de l’Université de Téhéran avant d’intégrer l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris cinq ans plus tard, après sa première exposition en 1973 à l’Institut Français de Téhéran.
En 1994, il se lie d’amitié avec Yves Bonnefoy et Bernard Blatter et s’intéresse aux éditions. Il reçoit en 2014 le Grand prix de bibliophilie (prix Jean Lurçat) de l’Académie des Beaux-Arts pour We talked between the rooms, poésie d’Emily Dickinson traduite par Yves Bonnefoy. Son site Internet.
« Et les œuvres de Farhad dans les premiers temps de son travail à Paris sont elles-mêmes la preuve que son regard de peintre n’était alors nullement requis par l’aspect extérieur des choses, couleurs et formes, jeux des couleurs dans les formes, dissolution du souci de l’être dans celui de la composition du tableau, comme ce fut le cas à travers l’histoire de l’Occident chez tant de peintres même paysagistes. Mais ce qu’il faut remarquer aussi, c’est qu’elles montrent que le risque que je disais presque fatal quand on cherche à signifier la présence comme telle existait bien aussi chez ce jeune peintre. » Yves Bonnefoy
Jérôme Thélot, ancien élève d’Yves Bonnefoy au Collège de France, disciple aussi de René Girard et de Michel Henry, est essayiste et traducteur, et professeur de littérature française à l’Université de Lyon. Ses écrits portent sur la poésie romantique et moderne, sur la philosophie de l’affectivité, et sur les conditions de l’image. Il développe auprès des auteurs qu’il interroge, en particulier Baudelaire, Rousseau, Dostoïevski, Sophocle, une poétique générale qui remonte à la fondation de la parole et de la représentation dans la violence originelle. Ses travaux sur la photographie ont d’abord décrit les conséquences de l’invention de celle-ci sur la littérature (Les inventions littéraires de la photographie, PUF, 2003), puis les caractères propres de sa phénoménologie (Critique de la raison photographique, Les Belles Lettres / Encre marine, 2009). Ses « Notes sur le poétique » (Un caillou dans un creux, Manucius, 2016) explicitent les attendus de sa recherche.
Presse
Vidéo de présentation de l’exposition Palimpseste à Périgueux.