Journal des moments Garache

La rencontre entre Nicolas Dufourcq et Claude Garache relèverait de l’anecdote si elle ne constituait pas un remarquable témoignage, intime et vivant, de l’existence et du travail du célèbre peintre des nus rouges. C’est en 2017 que Nicolas Dufourcq, guidé par sa profonde admiration, se décide à contacter Garache. S’en suivront six années d’échanges dans une amitié grandissante, jusqu’à la disparition de l’artiste en 2023. De ces instants partagés avec Claude et Hélène Garache, Nicolas Dufourq tient un journal, enrichi de nombreuses photographies prises sur le vif. Ces empreintes prélevées au fil des jours constituent le précieux document publié aujourd’hui, à la fois hommage à l’homme dans « tout ce qu’il est, gentillesse, respect, délicatesse », et accès privilégié à l’« atelier contemporain » dont il fut l’un des éminents artistes.

Date de publication : 15 novembre 2024
Format : 16 x 20 cm
Nombre de pages : 180
ISBN : 978-2-85035-172-3
Prix : 25 €

De propos échangés en choses vues, Nicolas Dufourcq trace le parcours écrit et photographique de ses rencontres en préservant la couleur des jours qui en dressent le cadre. C’est ainsi la restitution d’une mémoire au présent, conservant l’humilité et la fraîcheur d’instants où sont venus s’imprimer les joies, les inquiétudes et les silences familiers, le tout sur un ton de confidence sans impudeur. Ces émotions, captées dans le plus simple de leur apparition et sans intention de les plier à une quelconque forme d’idéalisation, sont autant d’occasions de réflexions sur l’art – celui de Garache, bien sûr, mais aussi celui des autres – et font de ces souvenirs le support de pensées dans une tradition aux antécédents remarquables : que l’on songe aux écrits de Charles Juliet sur Bram van Velde.

Le travail d’un grand artiste est toujours étroitement lié à la vie. Cette vie saisie par Nicolas Dufourcq nous brosse ici un portrait complet, touchant et sensible de Claude Garache dans les dernières années de son existence.

Les auteurs

Nicolas Dufourcq, né en 1963 à Paris, est directeur général de la Banque publique d’investissement (Bpifrance), depuis février 2013. Diplômé de HEC et de l’ENA, il a débuté sa carrière au ministère de l’Economie et des Finances puis au ministère de la Santé et des Affaires Sociales. Il rencontre le peintre Claude Garache en 2017, avec qui il restera proche jusqu’à sa disparition en 2023. Il tient un journal qui retranscrit leurs échanges pendant ces six années.

Extraits

« Première visite, automne 2017

Claude Garache m’accueille avec tout ce qu’il est, gentillesse, respect, délicatesse. Il me présente quelques tableaux en silence. Je suis moi-même presque muet. Il y a dans l’atelier de la rue du Cherche-midi, aux murs ocres, un silence si puissant qu’on pourrait l’entendre. La lumière tombe d’en haut. Claude regarde ses tableaux, attend que j’en demande d’autres. Sans doute m’observe-t-il dans mon dialogue avec ces œuvres qui pour certaines m’éblouissent. Je prends beaucoup de temps à les regarder. Je m’assois par terre, je m’agenouille, pour ne pas surplomber les tableaux posés à même le sol. Il me raconte son travail comme il l’a sans doute fait souvent, mais j’ai l’impression qu’il le fait pour moi. »

***

« "[…] Je me souviens de Raymond Mason, le sculpteur. Il sculptait des foules, dont celle de Saint Eustache. C’est ça qui l’intéressait. Il était lessivé à la fin de sa vie. Les vies de sculpteurs aujourd’hui sont très dures". On regarde sur mon téléphone le beau visage jeune de Raymond Mason, et par comparaison son visage âgé, fatigué. Je regarde celui de Claude, toujours jeune, intact, pétillant. Il rit de s’être sauvé de la sculpture. »

***

« Comme un Chardin des corps, Claude a travaillé sa vie entière pour que le corps et l’espace ne fassent plus qu’un et soient chargés d’émotion. Synthèse du silence et du mouvement, Claude a puisé aussi bien dans le grand art religieux que dans la joie profane des Baroques. Garache, grand méditant et grand vivant à la fois. »

Squiggle

Chaque volume monographique de cette collection suit un artiste dans son « tracé libre », selon la formule par laquelle J.-B. Pontalis traduit l’intraduisible mot anglais squiggle. Jeu de dessin à deux que pratiquait le psychanalyste D. W. Winnicott avec ses patients enfants, le squiggle instaurait une atmosphère de communication spontanée. Entendu dans une acception élargie, il nommera ici l’espace ménagé dans chaque œuvre au dialogue, à l’imprévu, à l’inconnu.