Vies de forêt

Vallées, forêts et monts vosgiens à la lisière de la Lorraine et l’Alsace : Karine Miermont traverse ces lieux depuis une trentaine d’années, travaille à leur protection. Les sensations vécues dans ces espaces, les expériences et surtout le désir, la poussent à raconter les vies de ceux qui y habitent : arbres, herbes, lichens, pierres, eau, animaux, hommes et femmes : « Toutes ces présences qui ouvrent des récits, des histoires ». Par l’observation, l’analyse, de telle source, tel arbre, tel cerf, pourtant familiers, l’auteure s’ouvre à l’étonnement et à la contemplation. Si l’élément naturel sature chaque page de ce récit, ce n’est pas tant pour le décrire, faire état de recherches très précises que pour en relater l’expérience sensible, existentielle, et ainsi la mettre à portée du lecteur.

Date de publication : 4 mars 2022
Format : 14 x 22 cm
Poids : 290 gr.
Nombre de pages : 176
ISBN : 978-2-85035-064-1
Prix : 20 €

On s’approche de tel pré, tel ruisseau, tel lynx, chat, buse, sanglier, chamois, biche, faon, chevreuil, héron, renard, loup… ; tel hêtre, érable, sapin, telle stèle, tel forestier, telle ferme, tel soldat, telle fermière… Sans lien chronologique entre eux, au gré des saisons, les instants vécus deviennent des séquences aux touches impressionnistes, le réel visible est perçu dans sa profondeur temporelle, comme un sédiment modelé par le temps et l’espace. « On pourrait ne pas s’arrêter, passer son temps à regarder et raconter ce que l’on voit, pendant des minutes, des heures, des mois, des années des siècles à dire infiniment ce qui se passe quand rien ne se passe soi-disant (...) ». Récit rythmé de faits, d’images et de réflexions où les mots, comme la forêt, deviennent lieu d’apprentissage, de ramifications infinies : « Les mots ces réservoirs, ces dépôts. Contiennent toujours plus que ce que nous y mettons quand nous parlons ou pensons ou lisons ou écrivons. » Cet au-delà inexprimable passe bien sûr par l’expression poétique qui ponctue le récit, de manière tout aussi singulière que dans son précédent ouvrage, Marabout de Roche.

La solitude que nécessite le face-à-face avec la nature est loin d’habiter l’écrit, au contraire, Karine Miermont le tisse d’anecdotes, de conversations, de fictions, de références livresques, d’études d’archives, mais aussi de citations proverbiales qui rendent hommage à des hommes, des femmes, des animaux. Face à la profusion des points de vue, difficile de déterminer la nature véritable du récit : analyse scientifique, recherche historique, essai critique, écrit poétique, la démarche est volontairement audacieuse. Portés par la ferveur d’un style lapidaire et instinctif, c’est l’éloge du sauvage, de la lenteur et du silence, la quête d’une totalité première qui traversent de part en part les lignes de cette œuvre.

Les auteurs

Karine Miermont, est née dans la Drôme, a grandi près de Perpignan, étudié à Toulouse puis à Paris. Longtemps productrice puis directrice artistique pour la télévision, elle a aussi écrit et réalisé des documentaires avant de s’occuper d’une forêt dans les Vosges. Elle est l’auteure de Vies de forêt (L’Atelier contemporain, 2022), Marabout de Roche (L’Atelier contemporain, 2021), Grace l’intrépide (Gallimard, 2019) et de L’Année du chat (Seuil, 2014).

Presse

Cet ouvrage a été récompensé par le prix Paysages écrits 2022, décerné par la Fondation Facim.

Entretien avec Caroline Gutmann, RCJ
Entretien avec Jean-Yves Laurichesse, Librairie Ombres blanches
Entretien avec Albertine Orcival, Chasses internationales
Entretien avec Jean-Michel Yoyotte, Radio Aligre

Myriam Ait-Sidhoum, DNA
Annie Aucante, En passant par ma Lorraine
Antoine Bertot, Poézibao
Benoît Duteurtre, Marianne
Éric Dussert, Le Matricule des anges
Jean-Paul Gavard-Perret, Le littéraire.com ; Le salon littéraire
Annabelle Hautecontre, Le salon littéraire
Jacques Henric, Artpress
Agnès Mannooretonil, Études
Vincent Piednoir, Jours de chasse
Marc Verlynde, La Viduité
Marie Viguier, Toute la culture

Entretien Orcival Vies de forêt Chasses internationales
Ait-Sidhoum Vies de forêt DNA
Dussert Vies de forêt Matricule des anges
Duteurtre Vies de forêt Marianne
Henric Vies de forêt Artpress
Mannooretonil Vies de forêt Études
Piednoir Vies de forêt Jours de chasse

Extraits

Quatre bêtes qui courent dans le grand pré, fuient le bruit de la traque sur le versant d’en face, un petit cerf ferme la marche, il y a eu un coup de feu quelques minutes avant.
Pas de gelée ce matin, les sols sont encore verts, mélange vert et jaune, roux, orange. Noisetiers font des buissons de petits troncs et de branchages larges et roux. Sapins et épicéas impassibles, mais impression de vert plus sombre qu’à la belle saison. Grand érable aux branches recouvertes d’un lichen céladon, donc clair, et extrémités de branchettes rousses, pousses de l’an prochain ? Il faudrait vérifier. Hêtres dessinés par des mousses vertes sur les troncs et les plus grosses ramures, lichen céladon sur tout le reste.
Piquets et ficelles du parc à vaches, esseulés eux aussi. Paysage seul. Toujours seul peut-être le paysage, dure plus longtemps que nous. Avant et après soi. Le paysage, le pays. La géographie, l’espace. Dès que seul, on écrit. Ça parle.
Les sorbiers entièrement recouverts de lichens, en grappes le long des branches comme des fruits. Pluie fine mais serrée, trace des lignes, goutte-rien-goutte-rien, multitude de gouttes avec intervalles, train de gouttes entrecoupées de rien depuis le ciel, wagons d’eau sur leurs rails invisibles, impression de trajets de gouttes, trajectoires plus ou moins verticales ou carrément de biais selon le vent ou la position des nuages.
C’est décembre.

Au début de ce livre il y a cette envie, ce désir de raconter la forêt que je connais depuis des années, trente années environ. Puis il y a tous les freins, les obstacles, les arguments qui devraient me détourner de cette idée, de ce désir : que sera le texte ? Un récit, un essai, un roman ? Il faudrait que la forme de l’expérience d’écrire ce désir de forêt fut déjà là pour que cela rassure tout le monde, moi, l’éditeur, et toi vous, lecteurs. Que je vous dise il était une fois, ne vous inquiétez pas, on sait où l’on va, nous allons emprunter quelques chemins habituels. Et puis non. Je me fie à moi, à mes sens, regarder, sentir, toucher, l’œil me semble capital, mais l’oreille aussi, et puis le toucher du pied, les appuis de la marche, les odeurs, les sons, tout cela mélangé, tous les sens mis en branle par l’expérience d’être, dire, imaginer.
Reprenons l’expérience à son départ, à l’envie, au désir : regarder la forêt, cette forêt, partir de là, marcher, écouter, sentir ; l’endroit, la maison, les passages, les arbres, les herbes, les animaux, les lectures, les archives, les visages, toutes ces présences qui ouvrent des récits, des histoires.

Littératures

Indifférente aux démarcations de genres, la collection « Littérature » entend représenter une approche curieuse de la création littéraire contemporaine. Poésie, récits singuliers, journaux, carnets, correspondances… : sans autres guides que la surprise et l’émotion, elle s’ouvre à des formes inédites, entêtantes, qu’elle enrichit en les accompagnant d’œuvres originales.

Indifferent to the dividing lines between genres, the collection « Literature » aims to represent a curious approach of the contemporary literary creation. Poesy, singular stories, diaries, notebooks, correspondence… : with no other guides than surprise and emotion, it opens up to new and enhanced forms, paired with original works of art.

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