Une histoire de l’art d’après Auschwitz. 3. Configurations

Configurations, vol.3
En quoi Auschwitz a-t-il rompu les modalités traditionnelles de représentation de la figure humaine héritées de la Renaissance ? Dans quelle mesure cette rupture s’est-elle logée dans le discours moderniste au point, désormais, d’y passer en partie inaperçue ? L’art contemporain est-il un art qui se situe simplement après Auschwitz ou bien est-il, de manière plus complexe, un art d’après l’événement ?
Telles sont quelques-unes des questions qui donnent a cette Histoire de l’art d’après Auschwitz ses principales orientations. À bien des égards, en proposant une relecture critique des fondements de la modernité artistique et une généalogie de l’art contemporain, cette vaste étude se veut donc aussi une contre-histoire de l’art.

Date de publication : 4 avril 2025
Format : 14 x 20 cm
Nombre de pages : 744
ISBN : 978-2-85035-178-5
Prix : 30 €

Le premier volume qui la compose a entrepris de réévaluer à l’aune d’Auschwitz l’histoire de l’art antérieure à l’événement lui-même. On y découvre notamment qu’avec la peur du déluge et de la guerre, celle de la peste constitue l’un des fondements de l’art renaissant et de l’ordre du discernement qu’il instaure. En dépit des Figures disparates (vol. 1) qui n’ont cesse pendant cinq siècles de perturber cet ordre, celui-ci ne céda véritablement qu’après Auschwitz, avec l’apparition massive de Figures disparues (vol. 2), lesquelles se sont progressivement dissipées dans l’art contemporain alors même qu’elles continuent d’en informer les Configurations (vol. 3).

Ce troisième et dernier volet d’Une histoire de l’art d’après Auschwitz se penche sur la façon dont un certain nombre d’artistes contemporains ont contribué à configurer la mémoire de l’événement sur le long terme.
Configurations part du constat que le pouvoir d’instauration de la figure humaine, traditionnellement prêté à l’art depuis que la Renaissance a investi l’œuvre comme instance de discernement du réel, s’est perdu après Auschwitz. Si les figures d’après l’événement, y compris les plus éloignées de lui, ressemblent encore à celles d’avant, elles sont cependant devenues en grande partie méconnaissables : leurs visages sont décontenancés, leurs corps oblitérés et les paysages alentour disloqués.
Reconnaissables bien qu’elles ne soient plus discernables, ces figures mémorieuses cohabitent dans l’imaginaire contemporain avec d’autres figures, oublieuses celles-ci, en ce qu’elles miment les corps d’avant. En dépit de leur dissemblance avec ces derniers dont elles conservent sans doute la nostalgie, les figures d’après apparaissent hantées par l’événement.

Si elles passent malgré cela pour des figures habituelles, c’est qu’un certain habitus visuel s’est constitué dans l’ombre portée de l’événement et à partir de lui. Les configurations qui en résultent impliquant une part de mémoire, se chargeant au passage d’autres mémoires, autant qu’elles se compliquent d’une part d’oubli, ce phénomène est longtemps demeuré largement inaperçu, et rarement théorisé. Qu’on ne s’étonne plus, aujourd’hui, d’évoluer parmi des foules de figures aux formes quasi-spectrales devrait pourtant susciter, en retour, quelque étonnement.
C’est tout le sens de cette Histoire de l’art d’après Auschwitz que de chercher à comprendre les causes et les conséquences de cette habituation et de l’omission qui l’accompagne. Aussi ce dernier tome inscrit-il à présent l’évolution historique qu’on y a retracée jusque-là dans une perspective théorique qui sollicite, entre autres, le concours critique de pensées aussi différentes que celles de Theodor Adorno, d’Emmanuel Levinas, de Paul Ricoeur, de Michel Foucault, de Gilles Deleuze, ou encore de Pierre Bourdieu.

Dans ce volume, P. Bernard-Nouraud étudiera, entre autres, les oeuvres de Gerog Baselitz, Miklos Bokor, Christian Boltanski, Marlene Dumas, William Kentridge, Anselm Kiefer, Eugène Leroy, Markus Lüpertz, Oscar Muñoz, Claudio Parmiggiani, Bernard Réquichot, Gherard Richter, Marc Ronet, Nicolas de Staël, Pierre Tal Coat

Les auteurs

Paul Bernard-Nouraud, diplômé de l’École des hautes études en sciences sociales et de l’Université Paris I, enseigne l’histoire de l’art au département Arts de l’université Aix-Marseille. Il a notamment publié dans les revues Marges, Tracés et Studiolo et collabore régulièrement au journal en ligne En attendant Nadeau.

Essais sur l’art

L’essai est une forme qui se détermine à chacun de ses usages, une forme différant sans cesse d’elle-même, autrement dit une forme ouverte. Ne jamais quitter le terrain de l’expérimentation pour celui de la certitude, c’est ce que voudraient permettre ces « essais sur l’art », qui dans leur pluralité ont en commun de chercher moins à dire une vérité figée sur les œuvres qu’à remettre en jeu et en mouvement leur secret.