En mettant en scène de petits soldats de plomb affublés d’éléments issus du monde vivant – végétal comme animal - le photographe Stéphane Spach et la plasticienne Anne Vigneux poursuivent à première vue un pur mouvement ludique d’associations, constituant un bataillon jubilatoire où l’absurde sert une poésie douce et nostalgique.
Mais de ce geste qui a trait à l’enfance se dessine peu à peu une autre forme de lecture, plus grave, qui émerge d’une prise de conscience par les deux artistes des résonances attachées à la guerre, à ses traumatismes, aux séquelles dont les soldats du conflit de 1914-1918 ont été les victimes.
Préface de Michel Bernard
Comme le suggère le titre, Le vent du boulet, il est aussi question d’un choc : celui profond, hébétant, de bombes qui ont laissé tant de combattants des tranchées au bord de la folie.
Sous couvert d’insouciance, c’est donc une remontée vers la question du sens de ces jouets destinés aux enfants, celle de leur origine : l’apprentissage de « l’art de la guerre » par des
officiers, dès le XVIIIe siècle, grâce à de minuscules figures en métal.
Ces assemblages photographiés laissent ainsi l’empreinte diffuse des tragédies humaines au revers d’une tendresse teintée d’humour que porte, comme une force de vie inattaquable, l’évidente complicité de deux artistes.
Les auteurs
L’univers de Stéphane Spach, emprunt de mélancolie, le conduit à photographier la nature. Tant avec des paysages, apparemment pauvres, qu’avec des vanités réalisées en atelier, il crée des ambiances théâtrales où la lumière, comme une obsession, constitue le matériau principal. Ses images, narratives, nous immergent dans un univers qui nous interroge sur le familier et l’étrange. Il a souvent recours à la série pour réaliser un travail parfois proche de la photographie documentaire, lui permettant ainsi d’interroger le monde.
Il a publié Terres fertiles avec Gilles Clément (Les éditions de l’Imprimeur, 1999), 12 Couteaux avec Philippe Fusaro (La Fosse aux Ours, 2001), ainsi que quatre ouvrages aux éditions L’Atelier contemporain : Stéphane Spach, photographe (2022), Parcelle 475/593 (2023), Les Oubliées avec Gilles Clément (2024) et Le vent du boulet avec Anne Vigneux et Michel Bernard.
Son site internet : https://spach-fine-art.com/
Anne Vigneux, plasticienne, vit et travaille en Alsace. Après une maitrise en Arts Plastiques, elle a étudié la scénographie aux Arts Décoratifs de Strasbourg.
Attentive au monde végétal, elle aime travailler à partir d’éléments glanés dans la nature. Ses récoltes, qui alimentent son cabinet de curiosités, constituent le matériau de ses créations. Pistils, graines, feuilles, branches deviennent de fragiles sculptures végétales, servent de médium ou posent silencieusement afin d’être dessinés. Son intérêt pour la botanique l’amène à poser un regard curieux et contemplatif sur le monde vivant.