Au milieu des années 1990, Jean-Pierre Ritsch-Fisch a abandonné l’entreprise familiale de fourrure, pour fonder à Strasbourg une galerie consacrée à ce que Jean Dubuffet appela l’Art Brut. Un retour à ses amours d’adolescence : le monde de l’art et ses sensations fortes, s’impose à lui. Débutant à la manière d’un conte, s’apparentant ensuite, tantôt à un roman d’aventures, tantôt à une enquête, Le Beau, L’Art Brut et le Marchand relate ce périple singulier.
Un océan sépare beauté esthétique et originalité absolue. Surgi des profondeurs, le jamais-vu est associé à des formes troublantes lesquelles, en bouleversant nos repères, ébranlent également nos certitudes. De l’ordre de l’apparition, cet inconnu traduit une altérité sans égale, aux antipodes des conventions et des goûts partagés par le grand nombre.
À mesure que la société industrielle s’étendait en Europe, en parallèle de l’intérêt croissant des avant-gardes pour les arts primitifs, naïfs et les dessins d’enfants, les productions d’aliénés, de détenus, d’autodidactes isolés ou de spirites retinrent peu à peu l’attention de diplômés de la Faculté, auxquels se joignirent quelques fins traducteurs de l’âme humaine, artistes et poètes. Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, le plasticien Jean Dubuffet appela « Art Brut » ces floraisons détonantes. En les distinguant au sein d’une collection qu’il constitua et enrichit au fil du temps, il entendait les protéger et à la fois les soustraire à un monde culturel mimétique, ainsi qu’au marché de l’art.
Depuis, l’Art Brut, y compris sous d’autres appellations, a essaimé sur tous les continents. La famille que composent ses créateurs déconcertants, voire perturbants et sans lien entre eux, s’est élargie aux handicapés et aux personnes d’âge. Avec plus ou moins de réussite, des ateliers créatifs ont ouvert leurs portes à leur intention. Cousins et alliés s’inspirent de leurs réalisations, y puisent l’énergie nécessaire à l’affirmation de leur propre voie, quand ils ne subissent pas bonnement leur influence. Certaines collections privées leur accordent une place de choix. Des musées acquièrent et exposent leurs travaux, lesquels trouvent aussi place dans de grands salons internationaux. Plusieurs galeries en Europe et aux États-Unis en ont fait leur spécialité.
C’est à Strasbourg, à l’intersection des routes, là où La Nef des fous trouva un port d’attache, que l’une d’entre elles a vu le jour. Au milieu des années 1990, Jean-Pierre Ritsch-Fisch, son fondateur, a été conduit à fermer l’entreprise familiale de fourrure. Il renoue alors avec sa première passion, pour le monde de l’art.
Commence sa quête de l’impossible : dénicher des œuvres d’originaux, de marginaux ou encore de figures historiques de l’Art Brut, et appliquer dans ses choix la même exigence qu’il s’imposait, jeune encore, pour sa collection première consacrée à la Figuration narrative. Puis, il largue les amarres et part à la rencontre des publics européens et américains. Le Beau, L’Art Brut et le Marchand raconte son aventure singulière.
Ouvrage publié avec le concours de la Fondation Antoine de Galbert.
Les auteurs
C’est à la fin des années 1970, au contact d’ateliers d’expression pour handicapés mentaux, que Laurent Fassin a découvert l’art brut et autodidacte. Par la suite, Michel Nedjar, dont avec des amis il publie des dessins dans la revue La Vie Exactement (1984-1988), l’oriente vers L’Aracine, le musée d’art brut à Neuilly-sur-Marne. En 2002, à Strasbourg, la galerie Jean-Pierre Ritsch-Fisch qui expose des œuvres récentes de Rosemarie Koczy va favoriser plusieurs échanges avec l’artiste. À compter de 2018, un dialogue régulier et nourri s’engagera avec le galeriste, à l’origine du livre Le Beau, l’Art Brut et le Marchand.
Après avoir donné À l’orée de forêts profondes (récit préfacé par Lionel Bourg, photographies de Serge Lapaz, Cognac, éditions Le Temps qu’il fait, 1987), Laurent Fassin a fondé la revue Légendes (1988-1999). Plusieurs de ses textes ont paru en revues (Théodore Balmoral, Conférence, Cahiers Bernard Lazare, La Cause littéraire, etc.). Depuis La Maison l’île, un recueil de poèmes rehaussés d’encres de Chine d’Elisabeth Macé (éditions Conférence, 2017), Laurent Fassin se consacre entièrement à l’écriture et à la peinture.
Presse
Philippe Chauché, La cause littéraire
Thierry Guinhut, littératures.com
Juliette Louazé, Critique d’art
Claire Margat, lacritique.org
Extraits